• « Leurs pas se confondaient » – Paulette Abadie-Douce – Editions de l’Harmattan- 2011- 180 p. (22 €).
Auteur de six ouvrages basés sur des témoignages ou des souvenirs divers, touchant à sa vie professionnelle, à l’Afrique ou à Arcachon, Paulette Abadie-Douce publie son premier roman. Son action va des sommets enneigés de la région de Grenoble aux rives du Bassin, à travers la vie d’un couple qui s’étend sur une génération. Comment l’amour naît entre ces deux enseignants, comment et pourquoi il disparaît : voilà l’intrigue du roman, toute simple, presque banale mais néanmoins douloureuse. D’autant plus que l’auteur sait bien faire partager au lecteur les efforts des protagonistes pour tenter d’éviter une séparation que, pourtant, il devine irrémédiable. Il y a de touchants récits de la vie quotidienne, de fines remarques sur l’évolution psychologique des personnages, de belles descriptions de paysages, des événements qui évoluent par de légères touches, sensibles comme celles d’ une aquarelle finement colorée au fil des saisons. Le tout sur un ton sincère et sans artifices mais avec une émouvante manière de démontrer que chaque rupture d’un couple devient non pas un drame mais une douleur lancinante, toujours difficile à oublier, malgré les apparences. Toute l’histoire terriblement ordinaire des choses de la vie.
Jean Dubroca.
• « Le français parlé à Bordeaux. » Jean Bonnemason. Edition des Régionalismes. (2011) 15,50 €.
Jean Bonnemason fut conseiller pédagogique en Gironde pour l’apprentissage de l’occitan en Gironde. Son ouvrage consacré au langage populaire bordelais, dit le « bordeluche », porte donc une marque académique qui le distingue de productions, certes de qualité, comme les productions de Guy Suire (« Pougnacs et margagnes »), ou de Max-Henry Gonthié (« La gueille-ferraille des mots ») qui, eux, se rapprochent davantage de la forme d’un dictionnaire.
La valeur ajoutée du livre de Bonnemason réside dans le fait que le lexique des mots et expressions du bordeluche subit un classement grammatical des plus scientifiques. Ce lexique compte deux parties : la première porte sur les mots et les êtres, ( sobriquets, jurons, coups, mots de l’enfance, etc.), la seconde sur les mots et les choses ( origines gasconnes, évolution des mots, mots spécialisés, etc.)
L’ouvrage étudie ensuite la phonéto-phonologie ( prononciations, accentuations, etc. Puis il étudie la morpho-syntaxe ( genres, nombres, formes verbales, etc.) et ensuite, par exemple, l’emploi particulier des articles, des pronoms ou de certaines constructions grammaticales.
Le résultat, c’est que Bonnemason démontre que le bordeluche est une véritable langue, largement inspirée du gascon et que, par conséquent, elle affirme donner une conception du monde et participer à son universalité. Restent une question : le bordeluche est-il une langue morte ou vivante ? En tous cas, elle est un fait historique et mérite donc beaucoup de considération, notamment de la part de notre académie.
Jean Dubroca.
• « Du coq à l’âne et réciproquement ». Conte. Jean-Claude Garnung. ( Les éditions du Panthéon). 2011. 114 p. 12,50 €.
– A Jean-Claude Garnung, on doit, notamment, la fort intéressante anthologie de textes évoquant notre Aquitaine : « Je vous écris de… ». Il livre ici un conte inspiré par un passage du Don Quichotte de Cervantès. Il s’agit de l’ histoire d’un maire qui a perdu l’âne paroissial, Avec l’un de ses amis de la municipalité, ils se lancent à sa recherche, imitant le braiement de l’animal par monts et par vaux, afin qu’il leur réponde.
Partant de cette situation, Jean-Claude Garnung imagine que lorsque l’âne municipal disparaît, le coq dominant le clocher de l’église locale s’envole aussi pour fuguer avec l’âne de Lasnier-en-Bray, un authentique baudet du Poitou. Les deux animaux, plus qu’humains, se retrouvent alors dans une forêt voisine où ils entament un dialogue quasiment surréaliste au cours duquel ils révèlent l’un à l’autre les mystères de leur vie antérieure. La retrouveront-ils, dans la paix de leur village rasséréné ?
Sur ce thème original Jean-Claude Garnung écrit un texte souvent truculent, toujours plein d’humour et de trouvailles inattendues dont les moindres ne sont pas des citations d’une notice de transformateur de l’EDF, d’une chanson de Trenet, du conte de Perrault, « Peau d’âne », mais aussi de proverbes et de dictons, toujours en situation amusante ou sarcastique, tirées d’œuvres diverses, sans compter des allusions à l’histoire locale ou au fonctionnement d’une municipalité.
Ajoutons-y des dialogues bien construits, des expressions imagées, un style très classique qui convient au modèle et parfois une gentille paillardise : tout ce qui fait pour qu’on prenne une belle dose de bonne humeur, bienvenue par les temps qui courent.