Dans le rétroviseur testerin
par Jean Dubroca
Gros plans sur le ciné de grand-papa (Episode IV, suite et fin)
Début 1998, voici paru l’article qui contribue à mettre fin à des mois d’interrogations, d‘ironie ou de perplexité, tout comme il met fin à la saga du cinéma de grand-papa à La Teste. J’obtiens alors de précieux détails sur la construction d’un complexe cinématographique, dans la zone commerciale de Cap-Océan. Sa création étonne même ceux qui l’ont le plus voulue. Le docteur Espied me confiera : « Qui aurait cru qu’on aurait ça ici un jour ! » Voici des extraits de l’article publié alors par « Sud-Ouest ».
Quatre-vingts pieux en béton de quarante centimètres de diamètre, enfoncés par des spécialistes à quinze mètre de profondeur, dans un sol marécageux, supportent un rêve de lumière de 2 500 m2 qui renfermera les huit salles de ce multiplexe de cinéma qui sort de terre en bordure de la voie directe. Elles accueilleront au total, en des espaces de volumes variés, 1450 spectateurs. Avec de tels chiffres, ce cinéma ne peut que s’appeler « Grand Ecran » et s’allumera, sauf imprévu, le 25 novembre prochain, un mercredi, forcément, jour traditionnel de la sortie des nouveaux programmes. Douze emplois polyvalents seront créés.
Voilà qui concrétise un souhait depuis longtemps formulé par la municipalité du docteur Espied tout autant que par la population testerine. Et tout autant aussi, et même depuis 1993, par le promoteur de l’opération, M. Michel Fridemann. Cet habitué du Pyla, exploitant de salles, notamment à Limoges travaille depuis vingt-cinq ans dans un métier que plusieurs générations de sa famille ont pratiqué avec passion, souhaitait s’installer dans le Sud-Bassin. Il a trouvé une oreille attentive, tant chez Jean-Paul Richard, maire-adjoint à la culture que chez le maire, Claude Espied et que chez Jean Pérez, promoteur de la zone commerciale Cap-Océan. (…)
Le cinéma, une fête
Les nombreux sceptiques qui se répandent autour du marché ne voient guère un cinéma fonctionner hors du centre-ville, surtout dans une zone commerciale, pourtant à peine située à cent cinquante mètres du clocher testerin. M. Fridemann leur rétorque : « L’expérience prouve que les multiplexes situés dans un endroit où l’on peut facilement garer sa voiture fonctionnent bien. » Il ajoute : « La bonne fréquentation de ces nouvelles salles correspond bien à un phénomène lié aux nouveaux services qu’elles offrent dans la distribution des horaires de séances, dans les tarifs modulés et dans l’atmosphère du lieu. » (…)
Car il s’agit de faire de la sortie au cinéma une véritable fête en étant aux petits soins pour le spectateur. Et M. Fridemann de citer les idées de M. Gérard Valleron, l’architecte du bâtiment, pour y parvenir : « il a su créer un effet <<Futuroscope >> en plaçant le spectateur face à une vaste image obtenue grâce à des installations parfaites de projection, appuyées par un son numérique dernier cri, le tout dans des salles en gradin, parfaitement isolées et climatisées, reliées par des ascenseurs, meublées par de profonds fauteuils dégageant toujours un espace de dix-huit centimètres au-dessus des plus hautes lignes de têtes, même celle d’un basketteur. » (…)
Evidemment, les programmes proposés constituent l’essentiel de l’opération séduction du public. Là encore, M. Fridemann se montre formel : « Tous les films qui sortiront en France seront montrés ici dans l’instant, y compris les films classés art et essai qui intéressent 25 % du public et y compris aussi, les 120 à 130 œuvres françaises produites annuellement ».
Alors, optimiste, Michel Fridemann ? Certes. Mais il se montre tout aussi réaliste car il s’appuie sur de sérieuses études de marché. Ce qui lui permet d’ajouter : « Il faudra établir notre entreprise à un rythme de croisière qui s’atteint à long terme. Mais ici, elle a tout pour réussir. Notre clientèle potentielle compte plus de 100 000 habitants, de Biscarrosse à Andernos, nous avons des accords avec la mairie testerine pour que les écoliers bénéficient de séances spéciales, liées à leur travail scolaire, nous créerons des animations culturelles et, comme plus il y a de films, plus il y a de public, nous le renouvellerons et il fera l’avenir du cinéma en France. » (…).
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Finalement, le complexe est inauguré le mercredi 2 décembre avec le film « Les Puissants », dans un grand concours de foule et de jazz. Plus l’occasion pour le docteur Espied de déclarer : « Les milieux officiels ne prêtent pas d’argent à La Teste de Buch, la ville qui dérange. Pourtant, elle entraîne la confiance des investisseurs privés ».
Dix-huit ans après, il faut constater que le pari de M. Fridemann – qui n’en était d’ailleurs pas un- a été largement gagné. Depuis, il a relancé trois des six écrans arcachonnais qui, un peu vieillots et surtout victimes de systèmes d’exploitation anciens, n’avaient pu résister à sa concurrence et il a étendu ses « Grands Ecrans » dans plusieurs villes d’Aquitaine. La preuve que le cinéma de grand papa qui, par le passé, a forgé tout cela, a encore l’avenir devant lui ….
Jean Dubroca
Légende photo: Le projet de façade du complexe cinématographique « Grand Ecran ». (Rep : Studio Images, La Teste.)