« C’est un beau roman »

TALENTS DU BASSIN   (#3)

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Les lectures de Jean Dubroca

 

ROMAN : « C’est un beau roman »

par Chantal Bonnet-Sanchez

 

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Après plusieurs nouvelles, essais et poèmes, Chantal Bonnet-Sanchez a publié en avril dernier son premier roman intitulé … « C’est un beau roman ». Un bon titre pour cet ouvrage de plus de cinq cents pages puisqu’il contient tous les ingrédients qui font le charme et l’intérêt de ce genre littéraire.

Qu’on en juge : Yona, l’héroïne centrale du récit passe ses habituelles vacances d’été au Cap Ferret avec Pierre, son époux. Avec eux, ses belles-filles, Lou-Anne et Alix ainsi que sa propre fille Lilia. Rien qui suffise à combler pour le couple une vie monotone, morne et sans passion. Et voilà que passe sur la plage un jeune homme de vingt-quatre ans, Anthony. Ce qui devait se produit arrive comme il se doit : Yona succombe au charme ravageur du bel Anthony. Certes, cela suffit à faire la trame de beaucoup de chefs-d’œuvre et non des moindres. Mais ici, rien ne se passe comme prévu puisque débarquent aussi des amies plus ou moins proches de la famille. On trouve là Jeanne, une truculente septuagénaire qui n’a point besoin de lunettes pour observer les réalités du moment. Arrivent aussi la douce Cléo et Framboise, pas commode du tout. Autant de femmes qui bouleversent les habitudes du couple amenant Yona et Pierre à une prise de conscience inéluctable de leur situation.

 

Le plus grand intérêt du livre, c’est que, à travers son aventure, son auteur se livre à une véritable introspection. Elle dépasse ainsi le rôle d’observatrice impartiale de l’humaine nature qu’est assez souvent un auteur pour s’embarquer comme un personnage à part à part entière de son récit. Ce qui lui permet de se livrer, à travers ses propres réactions, à une satire de notre société et à se mettre elle-même en danger psychologique devant les délices et les tourments qu’elle exprime, ajoutant, comme elle l’écrit « des maux aux mots ». Et c’est alors que le Cap Ferret intervient pleinement en regroupant la vie individuelle de ces quatre femmes pourtant si différentes les unes des autres. C’est là qu’elles se retrouvent dans le regard effrayé que chacune d’entre elles porte sur l’horizon de l’océan fuyant, insaisissable, tous les jours renouvelé, comme le temps qui fuit. Il faut alors s’attacher à l’urgence de vivre alors que l’angoisse du chemin à choisir brouille toutes les directions et qu’il faut essayer de choisir la bonne pour ne pas se tromper et tâcher de revenir à ce qu’était la vie au début de l’été. Le défi de vivre se substitue alors à la peur du lendemain et à la crainte du regard des autres.

 

Les évocations du Cap Ferret tiennent une intéressante place dans le roman. D’autant plus que Chantal Bonnet-Sanchez est musicienne et qu’elle voit dans la presqu’île, dit-elle, une ouverture d’embouchure dans ses couleurs, la vibration d’une anche de clarinette et des zéphirs mélodiques qui gonflent des voiles pour des promesses d’Amérique.

 

A découvrir.

J.D.

 

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– « C’est beau comme un roman ». Chantal Bonnet-Sanchez. Vents salés ed. (Collection Pourpre)- 2016- 519 p. 23 €.