81 # PATRIMOINE DU BASSIN
– La fête de la ruralité à Biganos. (*)
– Voilà dix ans que Bruno Lafon et quelques uns de ses copains du quartier de Vigneau, au nord du centre de Biganos, ont voulu que l’on se souvienne de l’importance de la vie agricole et forestière qui fut très important tout autour du Bassin et, notamment, dans leur quartier. Ce n’est pas pour rien qu’il est signalé par un rond-point où trônent deux vaches laitières statufiées ! Tout a donc commencé par une modeste fête de quartier, comme entre amis pour célébrer le souvenir de la vie pastorale du secteur et rendre hommage aux hommes et aux femmes qui se sont échinés pendant des siècles à labourer le sol et à résiner les pins.

Dans le fond des granges en bois, alors encore très présentes, rouillaient tout doucement, comme dans une ingrate agonie, des engins agricoles anciens, ceux qui ont commencé à mécaniser la petite agriculture un peu avant la guerre et, surtout, à partir du début des années 50. Les gens de Vigneau ont donc remis en état une moissonneuse, une batteuse et le tracteur qui les mettait en branle. Et, petit à petit, au fil des journées des retraités ont ainsi nettoyé, révisé, revisser, gratter et repeint des herses, des semoirs, des charrues puis ils les remises en marche devant des curieux qui découvraient des engins comme venus d’une autre planète.
Quand Bruno Lafon devient maire de Biganos, il développe l’idée d’agrandir la fête de son quartier natal pour en faire, en plein été, une « Fête au village ». Tout autre chose que ces foires aux huîtres uniformes et banales qui sont devenues plus de vastes restaurants, des comptoirs à crêpes et à moules espagnoles que de véritables célébrations du Bassin, de ses gens, de ses traditions et de son patrimoine. Rien de tel à Biganos. D’abord on y met en fonction toutes ces vieilles machines sous les yeux étonnés des enfants. Ensuite, on y ripaille mais à la gasconne, on s’y distrait avec les rouleurs de barriques, les jeux de « rampo » et on s’y active dans des ateliers où l’on peut travailler le bois, faire de la vannerie, suivre de près le sciage du bois et des résiniers au travail. On y découvre ainsi tous ces artisans d’autrefois qui ont su fixer les gestes de tous ceux qui ont rempaillé des chaises, cousu des dentelles, ferré les chevaux et cuit le pain dans des règles qui permettaient de le conserver huit jours sans qu’il durcisse.

Et pour que la démonstration soit complète, les amis de Vigneau ont décidé de faire pousser « leur » blé. Ils ont trouvé huit hectares de bonne terre dans leur quartier. Ils y ont semé du blé adapté au sol, à l’air marin et au climat aquitain. Maintenant, ils surveillent sa bonne pousse et son mûrissement de façon à ce qu’il soit à point pour en faire du beau blé qu’ils vont moissonner et battre « à l’ancienne » ce qui sera l’occasion de réjouissances. Puis, sous les yeux des visiteurs, on le transformera en farine et en pain pour que les hôtes de la Fête de la ruralité dégusteront avec respect car ils auront partagé tous les efforts qu’il a exigés pour venir jusqu’à eux.
C’est ainsi, au cœur de l’été, de façon emblématique, que se conserve au milieu de Biganos, tout ce patrimoine vivant qu’il s’agisse autant de matériels anciens que de savoir-faire ancestraux.
J.D.
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(*) Voir aussi « La Dépêche du Bassin » du 2 août 2018, sous la plume de Xavier Davias, « Sud-Ouest » du même jour (reportage de Marianne Scott) et le n° 5 du nouveau magazine de La Dépêche du Bassin, « SO Bassin », sous la plume d’Anne de Beaumarchais, avec des photos chaleureuses de Fabrice Chabot (P.56 à 58).