Av.6 mai.
L’ACTUALITÉ ARCACHONNAISE IL Y A PRESQUE CENT ANS
par Jean Dubroca
AVEC « L’AVENIR » DU DIMANCHE 6 MAI 1923
* MADAME CAILLAUX *
* Albert Chiché est tombé sous le charme de Mme Caillaux : « La cordialité de sa poignée de main, son accueil affable, sa conversation enjouée me la rendirent tout de suite sympathique et je me repentis de l’avoir attaquée à la légère. (…) Mais il ne faut pas se fier aux apparences. Mme Caillaux ressent profondément les injures. Elle en a donné récemment une nouvelle preuve, à l’hôtel Terminus de Bordeaux, en souffletant une dame qui la regardait de façon provocante. M. Caillaux a commenté : ‘’Vraiment, ma femme a la main leste !’’. (…)

Vous oubliez, me dira-t-on, que cette femme aimable a tué un homme. Mais un journaliste ne devrait jamais mêler les femmes à ses polémiques. Publier des lettres intimes provenant d’un vol est une action infâmante qui excuse la vengeance. Du reste, l‘acquittement est de règle en ces circonstances. Le jury de la Gironde a acquitté récemment Mme Morin qui avait immolé à coups de révolver son mari infidèle. Et Mme Clovis Hugues, en 1884, a massacré de cinq balles, en plein palais de justice à Paris, un agent interlope nommé Morin qui la harcelait de ses diffamations. Elle fut acquittée aux applaudissements de la salle. (…) Donc, en attendant la réforme de l’institution du jury, on doit respecter ses décisions. » (2)
* LA PROTECTION DE L’HUÎTRE PLATE *

+ L’article rappelle que des ostréiculteurs du Bassin ont, au début du XXe siècle, introduit des huîtres portugaises en provenance du secteur de Marennes-Oléron, dans la partie nord du Bassin, peu propice à la culture de l’huître plate. « Des protestations furent bien élevées mais ce n’est qu’en 1910 que des craintes de la destruction de l’huître plate par l’envahissement de la portugaise furent envisagées. En 1916, il y avait pléthore de portugaises (…) Le syndicat général de l’ostréiculture fut appelé à intervenir pour demander la destruction de l’huître portugaise dans le bassin mais il était trop tard. Il est impossible aujourd’hui d’enrayer le mouvement ». (3)
* « NOTRE MINISTRE DE LA GUERRE OUTRAGÉ PAR UN EMBUSQUÉ » *

« À l’une des dernières séances du Conseil général, M. Mandel (4) qui passa toute la guerre embusqué dans un bureau et qui s’est distingué jusqu’ici par son opposition à M. Poincaré, a osé prononcer la phrase suivante : ‘’M. Maginot, ce mutilé complet égaré à la tête des services du ministère de la guerre.’’ Bien que M. Mandel ait dit avoir voulu critiquer les capacités intellectuelles de M. Maginot, le Conseil général a voté une motion contenant son mépris pour le lâche insulteur. Quelle honte pour notre département d’avoir comme représentant ce métèque qui fait le jeu de l‘Allemagne en insultant les personnalités les plus éminentes du gouvernement français ! » (Signature : Albert Chiché.)
* INFORMATIONS *

+ Lundi, deux jeunes-filles se baignaient sur la plage des Abatilles, l’une en costume de bain, l’autre dans une combinaison qui laissait voir une partie de ses charmes.
+ L’éclat des fêtes pour le congrès des anciens combattants de l’UNC sera rehaussé par la présence de deux sous-marins qui mouilleront en rade. Deux escadrilles d’avions survoleront notre charmante station au moment de l’arrivée du ministre de la guerre.
+ M. Caillaux s’installera pour quelques jours à l’hôtel Régina après avoir quitté la villa « Les Orchidées ».
+ Dans notre ville, le temps du 1e mai fut idéalement beau et la chaleur très forte. Les oiseaux chantaient dans les branches d’aubépines et célébraient la fête du printemps et de l’amour.
– Pendant ce temps, « L’Humanité » de ce même 1e mai portait ces titres :
+ « Le réveil ouvrier se manifeste avec vigueur ». + « La sauvagerie policière provoque trois violentes bagarres à
Paris. Violentes bagarres à Saint-Denis ».
+ « Les assassins de l’Union civique : un volontaire conduit un
autobus. Résultat : deux morts et cinq blessés » (*)
+ « Vaste chômage dans les industries parisiennes ».
+ « Les cousettes continuent la bataille face aux flics qui les
poursuivent avenue des Champs-Élysées ».
+ « La résistance se poursuit dans la Ruhr. Attentats sur les voies
ferrées ».
+ « Les grèves anglaises : dans le Norfolk, 4000 ouvriers n’ont pas
repris le travail ».
(*) Petite organisation fascisante fondée par le général Balfourier (1852-1933).
* SYNDICAT D’INITIATIVE *
+ Le concours hippique de Pâques a rapporté 14 660 fr. 05. (*) Le compte tennis qui était créditeur de 7700 fr est devenu déficitaire depuis la réfection totale des courts qui sera de 2O 000 fr. Le syndicat va acheter 200 m. de film représentant le carnaval, le corso et les fêtes hippiques, moyennant la somme de 1200 fr. Les dix séries de figurines de dix Types du pays destinées aux expositions, aux musées et aux compagnies de voyages seront livrées en bois sculpté et peint ce qui leur donnera un côté plus artistique. Cette édition coûtera 4000 fr. Une subvention de 500 fr. est votée en vue d’assurer un service indispensable à la colonie anglaise.
(*) À rapprocher du prix d’un terrain de 12 000 m2 au centre du Moulleau, vendu 11 000 fr. le 1e mai 1923.
* LES RELEVÉS MÉTÉOROLIGIQUES DE M.MOULS *

ET PENDANT CE TEMPS,VOICI LES GRANDS TITRES DU « FIGARO » DU 6 MAI 1923
* ÉDITORIAL : « QUERELLES LITTÉRAIRES », PAR FERNAND VANDEREM *
+ La querelle littéraire entre Léon Daudet et Henri Béraud a pour origine le trop grand nombre de prix littéraires et quand M. Béraud s’attaque aux écrivains de La Nouvelle revue française, il ne fait que s’opposer à un phénomène social.
* « Du recrutement des jurys littéraires », par Marcel Laurent *
+ Le rôle des écrivains est d’écrire, pas de juger les œuvres de leurs confrères. Un vrai jury littéraire serait composé de douze citoyens majeurs de bonne vie et mœurs qui se chargeraient d’attribuer un prix en leur âme et conscience.
* « Il n’y a pas de plan franco-belge pour les réparations dues par l’Allemagne » *
+ Ce n’est que quand l’Allemagne fera des propositions raisonnables qu’un plan établissant les bases du règlement financier et de sa répartition pourra se faire entre tous les alliés.
* La république Rhénane : entretien avec le Dr Dorthen *
+ Cet irréductible opposant à l’Empire qui veut l’autonomie de sa région a déclaré : « Contre les Prussiens, il n’y a qu’une méthode : la méthode prussienne ».
* La semaine des P.T.T. a terminé son travail *
+ L’issue de ses débats a conclu à une nécessaire collaboration entre les usagers et l’administration.
* Un faux bruit *
+ On ne peut admettre que des sénateurs refusent de constituer le Sénat en haute cour de justice pour juger M. Cachin et ses complices accusés par le gouvernement d’atteinte à la sûreté de l’État pour avoir voulu soulever les ouvriers communistes rhénans contre les troupes d’occupation françaises.
* Échos *
+ Les cousettes n’ont arrêté leur grève que parce que les Parisiennes avaient trop chaud et attendaient les collections d’été.
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- Sources : Gallica-BNF.
- (2) La comtesse d’Osmon, voulant mettre un terme à la carrière politique du député socialiste Clovis Hugues, charge Jean Morin de ruiner la réputation de sa femme, Jeanne Royannez. Excédée par plusieurs mois de persiflage de Morin, Jeanne le tue en 1884.
- (3) Lire dans « La Dépêche » du 29 avril 2021 un article de Xavier Davas relatant comment, en 1930, on tentait encore de sauver la « Gravette », l’huître plate du Bassin.
- (4) Reconnu physiquement inapte par le conseil de révision, Georges Mandel fut le chef de Cabinet de Clémenceau, à partir de 1917. André Maginot fut blessé en 1914 par deux balles à la cuisse et dut subir plusieurs opérations au genou droit qui le fit souffrir toute sa vie. Il était docteur en Droit.
