AV. 12/19 at. – 21/8.

                  LA VIE  ARCACHONNAISE  IL Y PRESQUE  CENT  ANS

par Jean Dubroca

                       AVEC « L’AVENIR » DES 12 ET 19 AOÛT  1923 (1)

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                           * ÉDITORIAL du 12 AOÛT «  Y’A BON ! » *

+ Albert Chiché a vu la revue « Y’a bon ! » de Guy de Pierrefeux et André Valmy. Il a noté que le maire, M. Bon était dans la salle. Puis il évoque les différents tableaux :

– La dispute entre la chaisière de la place Thiers et une dame en villégiature.

– Le martyre des voyageurs des trains de plaisir.

– Un aviateur de Cazaux.

– Lucien Boyer, roi du Cap Ferret, débarquant à Arcachon avec une petite femme en chemise rose très courte. (Monique Varny).

–  Jean Baupuy en amiral.

– Alphonse, roi d’Espagne, escorté de deux belles danseuses espagnoles.

– Des fêtes, des régates, des bals masqués, des concours de baigneuses nues à la fin du premier acte.

– Sédard donnant une leçon de maintien à une marchande de royans.

– Le défilé des livres interdits.

– Et si vous voulez voir la suite et de jolies femmes peu voilées, il faut aller au théâtre Fantasio.  

                                         * CROISADE  NÉCESSAIRE *

+ Albert de Ricaudy part à son tour en guerre contre le projet de port à Eyrac. Pour lui : « il y a un dessous à cette affaire. Il s’agirait de faire une pêcherie monstrueuse, spéculant sur les prix élevés du poisson, ce qui marquerait le contrôle des pêcheries sur la ville. Déjà, un financier connu dans le monde des pêcheries, vient d’acheter un groupe de cinq villas aux environs du Charbonnage. (…) Ainsi, Arcachon serait en train de se dévorer lui-même. » Puis l’historien local poursuit : « Il serait important que face à cette menace, tous ceux qui y sont opposés  entrassent dans un immense syndicat  pour la défense des intérêts esthétiques et sanitaires d’Arcachon dont prendrait la tête quelque Pierre l’Ermite bien enflammé pour la Croisade. » (12 août).  

                                         * CORRESPONDANCE *

+ M. le Maire. Mon fils, vêtu d’un caleçon de bain et d’un peignoir, a été morigéné rue de la Mairie, par un agent de sûreté. Ce fait n’est pas isolé puisque l’agent spécial chargé de la surveillance des péplums sur la jetée Thiers a fait d’autres observations. (…) Or, M. le Maire, que pensez-vous des dames en corsage extra court laissant à voir à nu leur gorge ? (…) Sans parler des robes de fine gaze laissant paraître ce qu’on a l’air de vouloir cacher. (…)

L’arrêté que vous venez de signer soulève beaucoup plus de mécontentement que vous ne le pensez, surtout que les dix malheureuses cabines de bain qui existent ne peuvent pas abriter tous les baigneurs. (12 août).

                       * SYNDICAT DES COMMERÇANTS D’ARCACHON *

+ « Le Syndicat des commerçants constate que le commerce ambulant prend trop de place dans notre ville et que les autorités locales appliquent trop de mansuétude dans l’application des lois locales qui interdisent les abus du commerce ambulant, notamment dans les articles de bonneterie, draperies, tapis, fourrures, fleurs, optique, peinture, photographie, etc. Le Syndicat demande donc la stricte application par les autorités locales des prescriptions du droit local relatif au commerce ambulant. Le Secrétaire : H. Croisé.  (12 août).  

                                  * HYGIÈNE ET BEAUTÉ FÉMININE *

+ Contre les coups de soleil, voici une recette très simple : battre fortement un blanc d’œuf en neige ; en mouiller la partie malade et laisser sécher sans essuyer. La douleur doit cesser immédiatement et au bout de deux trois jours, elle a disparu. Si cela ne suffisait pas, il faudrait battre le blanc d’œuf en y ajoutant de l’eau de rose.

                                               * PYLA  SUR  MER *

+ Durant cette terrible canicule,  le maximum de température relevé a été de  27° mais tous les soirs, à partir de 4 heures, un vent frais règne sur la côte. La nuit, la température tombe à 20°. Si des incrédules ne croient pas qu’à 60 kms de Bordeaux, il puisse exister une telle différence de température, qu’ils viennent  se rendre compte. Une plage de sable fin de 4 kilomètres de long permet, à toute heure, de se baigner dans une eau admirable de pureté.

                                           * INFORMATIONS *

+ On annonce l’arrivée du prince et de la princesse André de Grèce ; de la princesse Mountbatten ; du prince royal de Suède avec son yacht ; de Mme Hériot ; de M. Blick, banquier à Lisbonne avec son yacht ; de M. Stuart, banquier à Londres ; de M. Lob-Lévy, président de la Chambre de Commerce de Barcelone. (12 août).

+ Mme Hériot (2) (sic)  qui barre en régate son superbe yacht est émerveillée de son séjour à Arcachon. La richissime propriétaire des magasins du Louvre va devenir une habituée de notre station. (12/8)

+ Le drame du Trianon (3) a causé une vive émotion dans les coulisses du Fantasio où l’on sait que les acteurs de la revue Y’a Bon appartiennent à ce théâtre. Leur directeur, M. Bonnal, avait la sympathie de tous ses artistes. M. Cahen n’est pas un inconnu pour Arcachon où il a fait des affaires de terrain, notamment avec les  Bernheim et à Pyla-sur-Mer.  Il n’a pas laissé un bon souvenir à ses ex-associés. (12/8)

+ Un des excursionnistes du congrès pour l’avancement des sciences a exprimé le désir de voir en auto la villa « Claude Bernard » de l’éminent docteur Lalesque. On lui a répondu : « Il est impossible de passer en voiture par le boulevard de la Plage car on est en train de le goudronner ». (12/8)

+ La municipalité ayant manifesté l’intention de faire construire des cabanes de bain aux Abatilles, les habitués de la plage ont juré de ne jamais s’en servir et même de les incendier pendant la nuit. (12/8) 

+ Les jeux du  concours hippique des 14 et 15 août comprendront trois épreuves : le jeu de la rose, le jeu des anneaux, le jeu des quilles. Ils seront obligatoires pour tous les participants. (12/8)

+ On nous informe que le député Mandel, dit Raspoutinette, viendra bientôt faire une réunion publique à Arcachon. Il y aura ce jour-là une bataille de tomates. (12/8)

                                                        * ESCRIME *

+ Le tournoi d’escrime du 25 août commencera par une épreuve individuelle de fleuret pour les juniors, magnifiquement dotée d’une coupe offerte par M. Lafitte, propriétaire du Café Thiers. Suivront : une épreuve individuelle d’épée et, le 26, une épreuve à l’épée par équipe de trois. (12/8).

+ Samedi à midi, le chauffeur du camion d’Express-Livraisons était descendu à l’octroi du Moulleau. L’énorme camion, mal calé, a descendu la pente jusqu’à l’hôtel des Arènes. Il a sauté le trottoir, a cassé une  barrière et s’est échoué dans la propriété de M. Lassale. Il n’y a pas eu de blessés. (19/8)

+ Lundi, vers 14 h., plusieurs jeunes gens et jeunes filles qui naviguaient sur un canot devant la plage des Abatilles ont été entraînés par un fort courant et de fortes vagues jusque devant Pereire. Leur barque qui dérivait se remplissait d’eau. Leurs parents supplièrent M. et Mme Chauhapé d’aider leurs enfants. Tous deux montèrent sur un canot et, ramant avec vigueur, parvinrent, non sans mal, à ramener le bateau des jeunes en péril sur la plage. M. Chauhapé donne des leçons de culture physique tous les matins sur la plage des Abatilles aux jeunes gens des deux sexes.

Dimanche à 18 h., un canot monté par M. Marmillon a chaviré devant le parc Pereire. Un bateau à moteur vint heureusement secourir M. Marmillon et son ami qui, étant habillés, nageaient péniblement. (19/8) 

+ La fête dans le parc mauresque a obtenu un grand succès. Mais les deux bicyclettes joliment décorées très appréciées du public n’ont pas eu de prix. Devant les protestations du public, le jury a été obligé d’accorder deux prix supplémentaires. Il est vrai que les bicyclettes n’appartenaient pas à des noms connus. (19/8)

+ Les régates de dames sont un plaisir des yeux. Melle Jacqueline Drouyn, fille du grand architecte, barrait le superbe yacht de M. Philippe de Rothschild.

+ Le cardinal a interdit au curé du Moulleau de célébrer la messe en plein air sur les plaintes de quelques pharisiennes aigries. La procession nautique du 15 août a été splendide avec de nombreux  yachts fleuris. M. le curé de Vivie est un organisateur de premier ordre et nous lui sommes reconnaissants d’avoir reconstitué dans sa paroisse les antiques processions nautiques de l’Arcachon d’autrefois. (4) 

+ Arcachon est la ville des princes. Le prince de Suède qui avait hésité entre Biarritz et Arcachon a déclaré : « Je regrette de ne pas être venu plus tôt à Arcachon ». Et s’il y avait un prix de beauté à décerner, il irait à la princesse de Grèce dont tout le monde a admiré la grâce vraiment royale.

+ Où va le monde à Arcachon ? Le 15 août, au banc de Pineau, (5) on a compté 117 bateaux et 47 pêcheurs à la senne. Le monde va sur le Bassin.

+ Si le curé de St Ferdinand était à Notre-Dame il serait bien malheureux car on sait qu’il n’admet pas les paroissiennes qui ont les bras nus et le reste itou. Dans ce cas, il viderait cette paroisse aristocratique où le luxe n’a jamais été aussi grand que cette année. (19/8)

+ La course cycliste Bordeaux-Arcachon a été marquée par de nombreuses chutes dues à la défectuosité de la route. Les blessés ont été conduits à la pharmacie du docteur Fleury, boulevard de la Plage.

+ Foule énorme à Arcachon pendant la journée du 15 août. Trains en retard. Quelques personnes ont couché dans la forêt pour ne pas payer un lit cinquante francs.   

                                               * LES SPECTACLES *

+ Perchicot, (6) l’as des chanteurs fantaisistes, la grande vedette des Folies-Bergères, consacré par l’élite du public, donnera ses toutes dernières nouveautés sur la scène du Fantasio, vendredi, samedi et dimanche.

+ Samedi 18  et dimanche 19, au Fantasio, on pourra applaudir  le populaire Sorius dans ses chansons de Troupier.

ET  PENDANT CE  TEMPS  À  LA  UNE  DU « PETIT PARISIEN » (1)

+ Un appel de lord Rothermere à l’opinion anglaise qui montre la nécessité pour la Grande Bretagne d’un accord étroit avec la France.

+ Le général américain Allen proposerait de séparer la Rhénanie du Reich. Il faut que cette proposition s’accorde avec les intérêts américains.

+ M. Hilferding nommé ministre des finances du Reich. Il doit tenter de guérir la lèpre qui ronge les finances allemandes. La  crise économique s’amplifie.

+ Le ministre français des finances déclare que les efforts de notre pays pour assurer son relèvement économique auront raison de toutes les tentatives spéculatives.

+ Notre enquête au bagne. Rousseng « l’inco ».

               – Albert Londres poursuit son fameux et mythique reportage sur le

                  bagne français de Cayenne. Il reste comme un modèle de travail

                  journalistique et eut un profond retentissement dans l’opinion

                  publique de notre pays. Il fait ici le portrait d’un bagnard qui a

                 été condamné à 3779 jours de cachot. Il dit au journaliste : « Je

                 finirai dans le ventre d’un requin, mais je veux revoir le soleil ! ».

                Londres  a écrit : « Notre rôle n’est pas d’être pour ou contre. Il est de   

                porter le fer dans la plaie ».

+ Un typhon ravage le port de Hong-Kong. Trois vapeurs sombrent corps et bien et un sous-marin anglais coule. Mais l’équipage est sain et sauf. Le paquebot français « André- Lebon » échappe au désastre.

+ « Je jure que c’est lui ! ». Lui, c’est Seznec que M. Deknuydt a vu, de ses yeux vus, le 20 juin en gare du Havre, le jour où la valise cachée de M. Quémeneur a été trouvée. 

+ Un formidable incendie dévore les bois de l’Estérel. C’est un vrai désastre.   

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• Sources : Gallica/BNF.
• (2) Virginie Henriot.
• (3) Le drame du Trianon : lire Bassin-Paradis du 10 août.  
• (4) Il semble donc que, contrairement à ce qu’on dit, les processions nautiques du 15 août devant le centre d’Arcachon ont été abandonnées pendant des années.  
• (5) Le banc de Pineau se trouvait entre les passes nord et sud, à peu près à l’emplacement de l’actuel banc d’Arguin.
• (6) André Perchicot. (1888-1950). Champion cycliste, il abandonne cette carrière à la suite de ses blessures de guerre  pour se lancer dans la chanson où il obtint un énorme succès international.